Paul Newman

Yano n’avait pas l’air de penser que discuter soit une bonne idée, et pour le coup, Hanan ne sut pas trop quoi lui répondre, étant donné qu’il avait effectivement plus ou moins compté sur la capacité à se remettre en question des malfrats. Enfin, heureusement le japonais ne fit pas trop d’histoire et grimpa sur le mur. Il se sentit un peu seul soudain, et faisant volte-face, se trouva bientôt nez à nez avec trois silhouettes aux visages indistincts mais pas spécialement engageants. Pas des géants mais ils avaient le gros avantage d’être trois et armés.

« Okay... un peu de calme, s’il vous plait. Il n’y a pas à voler ici, est-ce que vous avez conscience que... Putain ! Connard !»

Heureusement qu’il avait des réflexes, parce que là, le gros poing, il le sentit passer juste à quelques centimètres de son visage, le temps qu’il se décale sur la gauche. Fort heureusement, Hanan avait une solution alternative infaillible ! Fonçant la tête la première, il distingua un espace entre deux des gars, tâcha de s’y faufiler en courant... fut renvoyé contre le mur par un gros bras. Un peu sonné, il ne comprit absolument rien de ce que l’un des types lui dit avec un accent absolument épouvantable, mais fort heureusement, Yano vint mettre fin aux négociations. Se coller au mur ? Hanan n’essaya pas vraiment de comprendre pourquoi et s’exécuta. Une grosse brique passa au-dessus de sa tête et s’écrasa sur le pif du malotru le plus proche. Bien visé mon gars ! Par contre heureusement qu’il avait l’habitude du sang parce que c’était un peu gore, là. Les autres durent être du même avis car ils n’insistèrent pas et tirèrent leurs révérences. Pour combien de temps ? Il ne tenait pas à le savoir. Se tournant vers Yano, il essaya de se hisser, mais se rendre aussi léger qu’une plume n’est pas toujours facile quand on pèse plus de soixante-dix kilos. Finalement, il bondit aussi haut qu’il put, agrippa la main du japonais et réussi à attraper le rebord assez rapidement pour ne pas entraîner son collègue par-dessus bord. Il était temps, parce que leurs potes de la soirée ne tardèrent pas à rappliquer non plus. Le suivre ?

« Attends ! Tu ne vas p... »

Courir sur le toit ? Ben si. Il faut l’avouer, Hanan n’avait jamais testé, et il considéra comme une bénédiction la main de Yano qui le dirigeait, puisqu’il fixait à la limite plus ses pieds que la route devant eux. Hors de question de se bousiller la cheville sur une tuile mal attachée. Il commençait juste à s’habituer à l’équilibre plutôt précaire de la situation quand Yano lui fit remarquer la proximité désastreuse de leurs poursuivants. Les types qui faisaient des sondages sur la criminalité au Japon ne savaient vraiment pas ce qu’ils disaient ! Il bondit au bas du toit et courut vers la gauche presque avant que Yano n’ait terminé sa phrase.

Il sprinta comme un taré jusqu’à en avoir mal aux côtes, devinant derrière lui les bruits de cavalcade de ses poursuivants et se bénissant de n’avoir jamais fumé de sa vie. L’effet détente de l’Onsen s’était complètement évanoui certes, mais pour l’instant ce n’était pas ce qui le contrariait le plus. Après dix minutes de galopade dans un labyrinthe de rues plus ou moins aléatoires, il venait de réaliser qu’il était dans l’incapacité totale de situer la fac par rapport à l’endroit où il se trouvait actuellement. Stupidement, il s’arrêta pour regarder autour de lui, afin de voir s’il ne reconnaissait pas les environs. Là-bas, ce gros bâtiment lumineux, ce n’était pas le centre commercial de tout à l’heure ? Non c’était pas le bon quartier... Il y eut un bruit de sifflement derrière lui. Il se retourna et sentit quelque chose de froid passer tout près de son bras avant de s’écraser contre un mur dans un lourd bruit de métal. Il se remit à courir vers la lumière.
Or qui dit lumière dit... moins de danger. Les types ne s’aventurèrent pas dans les quartiers animés de la ville, et une fois perdu dans la foule, il put ralentir le pas, certains de ne plus être suivi. Il s’en tirait plutôt bien au final... juste les poumons en feu, quelques bleus et une petite entaille sanglante à l’intérieur du bras, résultat de la tentative de lancée heureusement échouée d’un de ses poursuivants. Il espéra que Yano s’en était aussi bien sorti... voire mieux tant qu’à faire, mais pour l’instant son principal souci était de retrouver la fac avant que ce dernier n’appelle les flics pour venir récupérer son cadavre.
Quelques renseignements plus tard, il se laissait tomber assis sur un banc devant la fac, un peu essoufflé et cherchant Yano du regard.

OK By Kailtyn